Bonjour à tous,
Aujourd’hui, je partage avec vous mon avis sur
« Mémoires d’un porc-épic » du célèbre écrivain Congolais Alain
Mabanckou, qui a reçu le prix Renaudot en 2006 pour ce roman.
J’ai entendu parlé de cet auteur lors de la sortie
de son livre « Petit piment » en 2015 et j’ai eu envie de découvrir
sa plume à travers ce roman en particulier, qui m’a intriguée car le texte
présente un caractère singulier. En effet, il est écrit d’une traite, sans
ponctuation à part des virgules.
Mais, je vous rassure tout de suite ! Le
manque de ponctuation n’est pas du tout gênant pour la lecture ! J’avais
moi-même des appréhensions au début qui se sont très vite dissipées dès les
premières pages.
Dans « Mémoires d’un
porc-épic », Alain Mabanckou explore l’univers mystique
africain, à travers la notion de double d’êtres humains, représentés par des
animaux. Ces doubles (des animaux, donc) peuvent être
pacifiques (caractérisés par leur générosité et leur vie consacrée à faire
du bien) ou nuisibles (redoutables, moins répandus que les doubles
pacifiques, et qui doivent exécuter les ordres de leur double humain et
commettre des meurtres mystiques), et leurs vies sont intimement liées à celle
de leur double humain, puisqu’ils sont destinés à mourir le même jour que ce
dernier.
Le narrateur est un porc-épic, double nuisible d’un
humain du nom de Kibandi. A la mort de ce dernier, à l’âge de 42 ans, le
porc-épic trouve refuge sous un baobab, convaincu qu’il va mourir lui-aussi
puisque tel est son destin.
En attendant cette mort imminente, il se livre à un
monologue dans lequel il s’interroge sur les raisons pour lesquelles il est
encore en vie. Interpellant directement le baobab, son confident,
il philosophe, analyse la vie des humains, leurs mœurs et habitudes, leurs
comportement ; et fait également une rétrospective sur sa propre vie et
celle de Kibandi, nous explique par le menu la notion de doubles pacifiques et
nuisibles, comment il en est arrivé à démarrer ce « métier », comment
il s’y prend pour « manger » les humains désignés par Kibandi, et les
péripéties et contraintes liées à cette activité pour le moins singulière.
J’ai aimé lire Mabanckou. Le texte, réparti
en six parties (chacune subdivisée en chapitres), est très bien
écrit ; le vocabulaire est recherché sans être ronflant ; la lecture
est fluide.
Toutefois, il y a une chose qui m’a dérangé dans ce
livre : les détails des meurtres mystiques commis par le porc-épic. Car,
étant moi-même africaine, même si je sais que ces pratiques mystiques existent,
je n’avais pas spécialement envie de prendre part aux confidences détaillées du
porc-épic. Ces histoires de sorcellerie, de pratiques occultes, d’êtres humains
qui « mangent » leurs semblables n’est définitivement pas ma tasse de
thé !
Malgré ce petit bémol lié à la thématique abordée
dans le livre et non au talent de narration de l’auteur, je compte bien
poursuivre mon exploration de l’univers d’Alain Mabanckou et vous donne
rendez-vous prochainement pour un partage littéraire d’un autre de ses romans.
Excellentes lectures à tous et à très
bientôt !
Citations
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c’est vrai que j’ai eu le privilège de battre le
record de longévité de mon espèce, de compter le même nombre d’années que mon
maître, je ne prétends pas qu’avoir été son double fut une sinécure, c’était un
vrai travail, mes sens étaient sollicités, je lui obéissais sans broncher même
si durant les dernières missions je commençais à prendre du recul, à me dire
que nous creusions notre propre tombe, je devais pourtant lui obéir, j’assumais
ma condition de double comme une tortue qui coltinait sa carapace, j’étais le
troisième œil, la troisième narine, la troisième oreille de mon maître, ce qui
signifie que ce qu’il ne voyait pas, ce qu’il ne sentait pas, ce qu’il
n’écoutait pas, je le lui transmettais par songes, et lorsqu’il ne répondait
pas à mes messages, j’apparaissais devant lui à l’heure où les hommes et les
femmes de Séképembé allaient aux champs
Page 79
mon maître n’avait pas passé un seul jour de sa vie
sans revoir cette nuit où son père nous avait vendu son destin, et les images
de l’initiation s’imposaient à lui, il se revoyait à Mossaka, à l^’age de dix
ans, en pleine nuit, une nuit peuplée d’effraies, de chauves-souris, cette nuit
où Papa Kibandi l’avait réveillé à l’insu de sa mère pour l’entraîner de force
dans la forêt, et bien avant de quitter la case le petit Kibandi assista à une
scène si peu croyable qu’il se frotta les yeux à plusieurs reprises, il
constata en effet que son père était à la fois couché près de sa mère et debout
à ses côtés, il y avait ainsi deux Papas Kibandi dans la maison, les deux se
ressemblaient comme deux gouttes d’eau, l’un était immobile, couché dans le
lit, l’autre était débout, en mouvement, et le gamin, saisi de panique, hurla
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les romans sont des livres que les hommes écrivent
dans le but de raconter des choses qui ne sont pas vraies, ils prétendent que
ça vient de leur imagination, il y en a parmi ces romanciers qui vendraient
leur mère ou leur père pour me voler mon destin de porc-épic, ils s’en
inspireraient, écriraient une histoire dans laquelle je n’aurais pas toujours
le meilleur rôle et passerais pour un animal de mauvaises mœurs
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